Y'om a écrit :Tin moi ça me parait tellement clair et évident que je comprends pas pourquoi ça ne l'est pas pour les studios...
On est tous comme ça. C'est parce qu'on est des joueurs doublé de fans, pas un éditeur avec une épée de Damocles économique au dessus de la tête. Nous, on achète, eux, ils choisissent ce qu'ils nous vende.
Konami, en 2006, a décidé d'entrer en mode Kojima-factory. Ils ont sorti des tas de trucs dont les amateurs de leur passé arcade n'avaient rien à foutre, arguant que, justement, les joueurs n'avaient plus rien à foutre de leur passé arcade. Evidemment, ils se sont complètement plantés, comme quand ils ont fait la bêtise d'annoncer ne plus faire que du mobile y a de ça quelques mois (soit dit en passant, à mes yeux, c'est p'tet' justement LE truc qui pourrait sauver cette compagnie, qui n'a, faut pas se leurrer, rien sorti de bien folichon depuis dix ans. Un nouveau marché aurait pu les décoincer et les sortir de l'ornière qu'ils s'étaient eux-même creusés -une situation qui n'est pas sans rappeler, tiens tiens, celle de la saga Gradius depuis le début des 90's.
DES 90's ! Gradius V a marché en 2005, parce que nostalgie, parce que qualité et parce que plein de trucs, et aussi et surtout parce qu'Irem était encore là pour forcer Konami à réagir, parce qu'on parlait encore d'arcade dans la première moitié des années 2000. Mais dans le contexte shmupesque actuel, Gradius a perdu toute légitimité. C'est une série has-been coincée dans le XXème siècle, et j'ai beau l'aimer de toutes mes tripes -c'est, quoique mon discours puisse paraître, ma série favorite entre toutes-, je suis bien content qu'elle ne soit plus d'actualité. Elle a gagné, comme R-Type, son statut de jalon absolu. Darius, avec ses dehors d'usine à expérimentation, est vraiment une des très rares séries anciennes qui peut proposer des trucs aujourd'hui. M'enfin bon, fermons cette longue parenthèse.)
Faut savoir que Konami, c'est une boite d'
entertainment, au sens large, et que leur département jeu vidéo pèse un truc minable du genre 15% du chiffre d'affaire. Faire des jeux, ça coûte de plus en plus cher, tu sais de moins en moins si tu vas en vendre des caisses, une pauvre petite phrase peut foutre le bordel sur internet... Faut des burnes, pour faire un jeu, sérieusement. Et Konami... Konami n'a pas
besoin de faire des jeux. Ils peuvent vivre sur leur merchandising pour trois siècles.
Leurs dix dernières années étaient assez paradoxales à ce sujet, d'ailleurs, parce qu'ils avaient fait de Kojima leur tête de proue (en dehors de PES, hein, que j'occulte volontairement depuis le début mais qui est LA vente annuelle du studio), mais Kojima -suffit d'une demi-recherche pour le comprendre- est un emmerdeur fini, un mec qui n'a jamais su bosser en équipe et qui chiait dans les bottes de sa hierarchie à longueur de temps. Alors certes, le monsieur est un game-designer d'exception, mais sa fuite, car c'est une fuite, je l'attendais bien avant 2015. Et je vous fiche mon billet que Konami n'attendait que ça : une fois débarrassé du garçon, Konami a pu tranquillement dire qu'ils ne feraient plus de jeux, puisqu'ils n'ont "plus personne" pour les faire (MGS, Castlevania, Silent Hill, Kojima était PARTOUT).
(En passant, ils n'ont pas "la licence" des jeux Hudson. Ils détiennent Hudson, tout simplement.)
Evidemment, dans tout ce marasme interne, pensez s'ils avaient une demi-pensée pour ce vieux machin abandonné dans un coin qu'est Gradius. Quitte à citer Castlevania au vol, vous imaginez, avec le beat'em all lambda sur-hypé et surestimé que les deux volets kojimesques en ont fait, ce que serait devenu Gradius dans les mains du Konami moderne ? Je photoshope des images du dernier Ace Combat en mode spatial ou votre imagination suffit ? Non, sérieusement, quelle que soit la façon dont je tourne le problème, j'en viens à la même conclusion : ils ont bien fait de laisser Gradius tranquille. Alors ouaip, ça fait partie de leur histoire et ce serait cool qu'ils continuent à la faire vivre, mais je doute franchement qu'ils se soucient ne serais-ce qu'à moitié de jouer au delà de la carte hommage mercantile à deux ronds (une technique toute capcomienne que je trouve pour ma part délicieusement cynique).
C'est là que se fait toute la différence avec Taito. Taito a un truc que Konami n'a pas : une maison mère. Taito appartient à Square Enix. Et Squenix est un monstre. Taito, c'est leur pôle arcade, ils fabriquent de la Type X à tour de bras, exploitent des salles immenses, ils sont omniprésents sur ce marché. L'inverse total de Konami, qui a déserté les salles. Alors Darius, c'est pas seulement leur grand passé, c'est encore pleinement leur présent, un truc bon à te booster l'image d'une salle d'arcade à coup de bornes dual-screen. Tu parles si, dans ces conditions, ils étaient prêts à filer un projet Darius à une bande de mecs sortis de nulle part. Sérieusement, Pyramid n'a développé qu'un seul jeu de toute son histoire, et c'est Darius Burst.
Au delà même des possibilités purement shmupesques dont je parlais tout à l'heure, y a donc toute une réalité économique à prendre en compte et des démrches éditoriales radicalement opposées pour les compagnies.
A mes yeux, Konami a toujours été "le sale gosse" de l'arcade, une boite qui n'a jamais rien inventé mais a pris, au contraire, un malin plaisir à démonter et à dynamiter tout ce qui les autres créaient, jusqu'à paraître meilleur que l'inventeur de ce qu'ils piquaient. Voyez leurs shmups, leurs jeux de bagnoles, leurs beat'em alls... Rien de neuf, mais une image à la cool, des couleurs flashy et une envie de pousser au bout du bout les idées de game-design des autres (c'est pas un reproche, bien au contraire).
Taito, c'est autre chose. C'est le papa de l'arcade nippon, un moteur du marché, un constructeur (sérieusement, ils ont arrêté de faire des jeu
EN 1999 et on en parle encore aujourd'hui comme de l'acteur majeur en salles). On connait plein de leurs jeux, mais ils ont plus édité que créé, et leur vraie force, c'est la course au hardware qu'ils ont menés à Sega depuis la fin des années 70.
Taito est une boite arcade avant tout, là où Konami a fini par se développer ailleurs que dans les salles, et a réellement explosé une fois dehors, en s'asseyant avec Capcom comme la meilleure firme à faire le transfert arcade-console. Et m'est avis que Konami n'a non seulement aucun intérêt à y revenir, mais que la firme peut tout aussi bien quitter le monde du jeu vidéo en général sans laisser de grand vide et, surtout, sans perdre un denier dans l'opération.