[fanboy inside 120] Le journal de Simon

Tranches de passions surtout rétro et surtout gaming, mais pas que. Alias "FBI" - si les fédéraux débarquent, c'est Yace qui a fait le coup.
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En fouillant chez le bouquiniste, j'ai trouvé un vieux journal, ecrit en allemand. apres l'avoir fait traduire, voici ce qui y etait consigné :
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Journal de Simon Belmont

17 Octobre 1691

Me voici de retour à Prague après un long exil. Ma famille a longtemps fuit l'Église qui l'a condamnée pour hérésie, mais depuis que mon ancêtre Trevor a vaincu le prince des ténèbres voilà 300 ans, ce sont les adorateurs du comte maudit qui nous persécutent. Amusant quand on y pense, de voir que l'ennemi d'hier est devenu notre protecteur...
J'ai rendez-vous avec le père Andras, du village nommé « Fetra », situé à moins de 5 lieues du lac où se dresse le sinistre château du comte. Celui-ci me dresse un tableau très pessimiste de la situation : des gens disparaissent assez régulièrement, et la maladie s'est installée au village. Les récoltes les plus tardives ont pourri sur pied, et ce qui a été récolté semble avoir des difficultés à se conserver. Il est venu à regret pour m'accueillir, car chaque jour passé loin de sa paroisse permet aux ténèbres de corrompre un peu plus ses ouailles, et il a peur de retrouver une paroisse vide en rentrant. Je me dit, non sans un certain cynisme, que c'est peu probable, le démon étant trop friand de sang frais pour piller à ce point son garde manger.

21 Octobre 1691

Enfin à Fetra, les routes sont étroites et dangereuses : au moins 4 arbres en travers du chemin, à croire que les forces des ténèbres font tout pour gagner du temps. Nous sommes arrivés en début d'après-midi, le château étant à environs 5 lieues (NDT : 20km), mon hôte suggère que je passe la nuit au village, j'ai l'impression que ma présence le rassure. J'en profite pour préparer mon équipement : coté armement, j'ai évidement l'héritage familial, à savoir mon fouet « tueur de vampire », l'arme bénie (ou maudite selon certains) qui a valu un long exil à ma famille. Il permet de frapper de loin, même si je ne peux pas taper aussi vite qu'avec une épée. J'emporte également 5 dagues, équilibrées pour le lancer, que je vais faire bénir par le père Andras (ça lui permettra de reprendre confiance en lui, et tout effet supplémentaire sur les serviteurs du démon est le bienvenu !). J'emporte également une hache de lancer, plus pour pouvoir défoncer une porte que pour l'envoyer, vu son poids il est préférable de l'envoyer « en cloche ». Le père Andras doit également me fournir assez d'eau bénite pour remplir 4 flasques et une gourde (je redoute les effets du maléfice ambiant sur ma santé si je bois autre chose une fois dans le château).
Coté protection, j'ai opté pour une protection légère, qui me laisse une entière liberté de mouvement. J'emporte aussi une montre, pour savoir à quel moment il est préférable d'attaquer : j'ai demandé à être réveillé avant le lever du soleil, de façon a noter précisément l'heure du lever (même si d'un jour à l'autre il y a une légère variation) : c'est en effet aux aurores qu'il est le plus avantageux d'affronter l'ennemi, lorsque celui-ci rentre de ses errances nocturnes il est vulnérable, et l'imminence du jour joue en ma faveur. Contrairement au idées reçues, le jour ne le tuera pas, mais devrait lui faire perdre suffisamment de forces pour que je le renvoie au néant dont il est revenu il y a peu.
De ma fenêtre j'aperçois au loin les reflets du lac où est perché le château. Je vais profiter du reste de l'après-midi pour relire les mémoires de mes ancêtres Trevor et Christopher Belmont.

22 Octobre 1691

Réveillé tôt comme prévu, j'ai noté l'heure de lever du soleil : 6h53min. Les mémoires de mes ancêtres me laissent perplexe : si le château est bien situé à chaque fois dans la région, les descriptions diffèrent fortement quant à l'aspect et l'architecture de l'endroit. Ceci étant, mon aïeul Trevor écrit que le château s'est écroulé comme une pile de cartes lorsque le maître des lieux a été vaincu, alors que Christopher prétend que le château était debout lorsque le comte est réapparu 120 ans plus tard. Il décrit par contre la même scène d'effondrement à la mort du comte. Qu'en penser ? Aucun adorateur du démon n'a eu assez d'influence pour rebâtir si vite pareil édifice, et l'Inquisition n'aurait de toute façon pas permis pareille entreprise, aussi isolé que fut l'endroit. Reste la théorie selon laquelle c'est la magie impie des démons qui rebâti l'endroit à chaque réapparition du seigneur des ténèbres.

Me voici enfin en vue du lac, il est plus de 3 heures après midi : la piste menant au château a été saccagée pendant la nuit, impossible de passer à cheval, c'est comme si la foret avait avalé le chemin. J'ai donc du marcher à travers une foret épaisse, au sous bois touffu et tapissé de ronces, le tout sans personne pour me guider, les villageois étant morts de peur. La plupart avait d'ailleurs les traits tirés, le visage have et les yeux chassieux : je ne saurais dire s'il s'agit de peste ou d'envenimation par le vampire, mais je comprend mieux les angoisses du père Andras.

5 heures, je suis enfin devant la grille d'entrée du château, j'ai longé les rives du lac, tout en me tenant à bonne distance des eaux noires qui y stagnent. Il règne une atmosphère pesante ici, et chaque ombre, chaque tache de brume semble receler une intention funeste. La magie transpire de chaque pierre, et mon fouet semble réagir à ce phénomène, il semble plus lourd, et j'ai presque l'impression qu'il est plus long..

La nuit tombe, aidée par l'ombre du cirque montagneux qui entoure le lac. Je rentre dans le château, et ce faisant je remarque que les murailles semblent plus hautes que lorsque je les contemplais depuis l'autre rive du lac. En fait, on dirait presque que les pierres sont vomies par la brume qui se lève.

Je fais une pause, car je suis blessé. Après avoir traversé un petit jardin, j'ai franchi les douves grâce au pont levis qui s'est abaissé à mon approche. Nulle présence pour l'actionner, je commence à penser que mon hôte est parfaitement au fait de mon arrivée, ce qui n'augure rien de bon. Je traverse ensuite un grand hall décoré de tentures et de tableaux évoquant vaguement ceux que j'ai pu apercevoir à l'évêché de Prague, à cela près que ces « œuvres » dégoulinent de perversion. Je n'ose même pas décrire ce que j'y ai vu, mon esprit essayant de chasser la souillure qu'il s'est infligé en les voyant. L'endroit est occupé par des créatures vaguement humaines, vêtues de haillons qui se jettent vers moi avec un soupir plaintif. Quelques coup de fouet me permettent d'avancer, et je constate avec effroi un certain air de famille avec les malheureux que j'ai laissé au village. J'avance sans me retourner, et je cours en essayant d'en blesser le moins possible, certains n'ont pas l'air encore morts.
J'arrive à un escalier, mais une fois franchie la porte, je constate que la terrasse s'est effondrée, laissant comme seule option un escalier de bois s'enfonçant dans les ténèbres humides d'un sous-sol. J'y descend à contre-cœur, mais il semble que cela soit le seul passage. Un coup d'œil à ma montre me laisse abasourdi : j'ai du mettre moins de cinq minutes à arriver ici, peut-être dix minutes en supposant que l’hébétement face aux tableaux impies m'ait fait perdre du temps, mais la montre affiche désormais 8 heures, comme si le temps à l'intérieur du château était différent. Je ne saurais dire si le temps passe plus vite (auquel cas je dois me dépêcher), ou si l'heure est figée à un moment précis.
Le tunnel est très sombre, mais depuis mon arrivée, des torches s'allument dans les pièces où j'arrive, à croire que mon hôte veut que je sache qu'il m'a à l'œil, à moins qu'il ne s'agisse d'une protection divine, qui sait quelles forces sont réellement à l'œuvre en ces lieux ? Une série de clapotis m'indique 2 choses : il y a de l'eau, et elle est peuplée ! D'étranges créatures, mi-hommes mi-poissons sautent hors de l'eau pour m'attaquer. J'utilise de nouveau mon fouet, et les bêtes immondes explosent dans un râle sinistre. J'aurais presque pitié d'eux s'ils n'étaient aussi nombreux et acharnés. Dans la panique, j'actionne le ressort de ma montre, qui n'a pas quitté ma main depuis la stupéfiante découverte. Et là, la magie fait son œuvre : il semble que le temps soit de nouveau celui qui s'écoule hors du château, les événements se figent autour de moi, ralentis au point de sembler immobile. J'en profite pour courir vers la lumière provenant d'un autre escalier. Me revoilà dans la pièce où la terrasse s'est effondrée, mais cette fois ci de l'autre coté du mur de gravats qui entravait ma progression. J'escalade jusqu'à une autre porte, et me voilà devant un autre hall décoré. Cette fois, je suis accueillis par 2 créatures ressemblant à d'énormes chats. J'ai déjà entendu parler de panthères, mais voir ces 2 grands chats de la taille d'un loup a de quoi surprendre. Pas le temps de dégainer mon fouet, j'utilise ma dague pour poignarder le flanc du premier alors que je me jette sur le coté. Un feulement rauque signale ma victoire, mais l'autre assaillant me griffe cruellement la cuisse alors que je retire la dague de la poitrine de son compagnon. Je tombe, et je donne à l'aveugle un coup de dague qui finit dans le cou du second assaillant qui s'écroule à son tour. Les carcasses se mettent alors à fumer avant de se consumer sous forme de brume. Mes blessures sont bien réelles par contre, et brûlent atrocement. J'espère que les griffes de ces horreurs n'étaient pas empoisonnées, je n'avais jamais vu autant de dents sur un félin. Un escalier se trouve à l'autre bout du couloir, avec une porte. Au moment où je m'apprête à monter les marches, la mère de toutes les stryges se précipite sur moi ! Vision infernale de dents mues par des ailes de cuir, cette chauve souris fait la taille d'un veau. L'idée qu'il puisse s'agir du maître des lieux venu m'accueillir en personne m'effleure, mais la morsure me ramène à la réalité : cette chose n'est qu'une bête sauvage corrompue par la magie ambiante, et elle a faim ! Cette fois-ci j'ai ma montre à la main, et je décide de retenter d'altérer le cours du temps : j'appuie sur le mécanisme... et rien ne se passe ! Je roule, pris de panique, j'essaie de me calmer en profitant du temps que la créature met à faire demi-tour. Les paroles de mon mentor fusent dans mon esprit : « La magie est affaire de courage et de mental ». Ma rencontre avec les chats, mes blessures et l'effet de surprise ont affaibli mon esprit, je dois donc me calmer et me motiver pour pouvoir utiliser la magie sereinement. Cette fois-ci je fais le vide, je me détends, et alors que la créature se précipite sur moi, j'appuie sur le mécanisme : une légère vibration de l'air, et la chose se retrouve suspendue à deux coudées de moi, la gueule ouverte
pleines de dents ivoire dépassants de gencives d'ébène. Je prend mon fouet, et je frappe comme un sourd, jusqu'à ce que la chose de soit plus qu'une plaie avec des poils. Le temps reprend son cours des lors que je réalise la sauvagerie dont je viens de faire preuve, voyant la créature exploser dans une gerbe de sang avant de partir en fumée. Bizarrement, il semble que la mort de cette chose ait apaisé les lieux, j'en profite donc pour bander mes blessures qui me lancent, et écrire ces quelques lignes. Je crois que je vais renoncer à l'usage de la montre si je rencontre de nouveau une créature aussi puissante et rapide : je n'aurai pas toujours le temps et l'espace de manœuvre nécessaire pour reprendre mon calme si je suis surpris. Et je ne suis pas sur que des ennemis plus forts ne soient pas immunisés contre ce décalage temporel. La porte donne sur les combles d'un bâtiment de briques rouges, le château étant bâti à flan d'un éperon rocheux surplombant un lac, il n'est pas étonnant de voir que ce qui m'a semblé de loin être la chapelle du château soit construit sur d'immenses fondations de briques.

Je fais une pause, il fait de plus en plus chaud, on se croirait à Rome en plein mois d’août. Au début, j'ai cru que la couleur rouge des mur influençait mon jugement, mais il est évident que la température est anormalement élevée. L'ascension des escaliers m'a rapidement confronté à des squelettes animés par magie, qui attaquent en se servant de leurs propres ossements ! Il est assez facile de les faire éclater en petit morceaux en balançant la hache dans leur direction pour les faire reculer contre la paroi, avant de leur donner le coup de grâce au fouet. Par contre, plus haut, j'ai rencontré ce que j'ai pris pour d'authentiques chevaliers en armure, et qui se sont révélés être des armures vides mues par magie. Chaque coup de fouet sur ces armures donne lieu à de grandes étincelles bleues, et au bout de quelques coup elles finissent par s'écrouler. Pas spécialement agressifs, mais souvent postés aux mauvais endroits, les escaliers et paliers étant très abimés, la marge de manœuvre devient limitée.

J'ai eu la surprise de tomber sur un étrange mécanisme de mort en franchissant la porte du premier escalier : des portions de plafond garnies de pointes de fer tombant et remontant au rythme d'un mécanisme caché. Je commence à croire que si l'architecture du château présente bien des réminiscences de ses précédentes apparitions, elle semble toujours s'orienter de façon à anéantir les visiteurs. Je crois que les pièges et autres chausse-trappe vont être de plus en plus nombreux. Évidemment, l'étroit corridor qui abrite le funeste mécanisme est la seule issue ! J'ai donc du patiemment étudier le minutage des plafonds piégés pour traverser. Une fois franchis le piège, une échelle de meunier m'amène dans un corridor situé juste au-dessus. Quelle surprise : une autre série de pièges, cette fois-ci il s'agit de tiges métalliques rotatives, sur lesquelles sont fixées des lames. Vu leurs emplacements respectifs, c'est la rotation des tiges qui semble fournir l'énergie des plafonds piégés du couloir de l'étage inférieur. Les lames tournent heureusement très lentement, l'esquive serait presque aisée si je n'était harcelé par des chauve-souris de la taille d'un chat ! A croire que ces créatures ont reçu l'ordre d'attaquer chaque fois qu'il y a une manœuvre délicate à accomplir. Une fois arrivé de l'autre coté, j'attaque la dernière ascension, qui devrait m'amener au niveau de la cour intérieure du château.

Je suis blessé, j'ai mal partout, je dois me reposer. En fait, c'est mon esprit qui est peut-être le plus marqué. J'ai donc entamé l'ascension du second escalier, que je pensais ponctuée seulement des affrontements avec les habituels squelettes et autres armures. A peine avais-je monté 3 marches qu'un rire sinistre, vaguement féminin, m'a fait sursauter. Le temps de me retourner, je ne vis qu'une tête flottant vers moi, une tête de femme, à la beauté fascinante, tout juste entachée par la chevelure serpentine qui grouille dessus. Impossible d'éviter le choc, une sensation de froid intense m'envahit (et bizarrement, malgré la chaleur ambiante, elle n'est pas la bienvenue), et la vision de 2 yeux cruels qui me fixent envahit mon esprit l'espace d'un instant. Je vacille et tombe à la renverse, heureusement de pas très haut. Il me faut bien 2 à 3 interminables secondes pour sentir de nouveau la chaleur de mon corps et pouvoir recommencer à bouger. Si cela m'était arrivé plus haut, ou lors d'un saut au dessus d'un paliers démoli, je serais sans doute mort. Je commence donc à monter, lentement, tendant l'oreille et me méfiant des murs d'où cette chose semble être sortie. Arrivé au palier, de nouveau le rire strident, cette fois-ci je suis prêt, et le fouet claque... sur de l'air dirait-on. Apparemment, cette chose est éthérée et immatérielle. Si j'en juge par la sensation que j'ai éprouvée, elle transmet la volonté et le maléfice de quelque chose de plus fort. Je reste donc prudent tout le long de l'ascension, avec raison car la chose réapparaît régulièrement pour m'agresser dans les situations les plus critiques. Finalement, l'ascension se termine, et me voici dans un petit corridor, la chaleur semble avoir augmenté d'un palier supplémentaire, à mesure qu'une humidité étouffante s'installe. J'aperçois alors un serpent, tout petit et inoffensif (c'est si rare en ces lieux). Le détail me choque pourtant, car nous sommes aux portes de l'hiver transylvain, et en cette saison les serpents et autres lézards ont déjà entamé leur retraite hivernale. Plus j'avance, plus je remarque de petits reptiles et d'autres ophidiens curieux. Je n'ai plus été agressé par la tête volante depuis quelques minutes. Le couloir débouche finalement dans la nef de l'église, près de l'entrée principale, bouchée hélas par un éboulis de gravats. Un frisson me parcours alors le dos et je me retourne en direction de l'autel, prêt à constater que j'ai été mené droit dans un piège par quelque monstre tapis en ces lieux. Le choc dépasse toutes mes attentes : une masse grouillante de serpents a établi son nid sur l'immense crucifix doré qui trône au fond de la chapelle. Mais quelque chose d'autre capte immédiatement mon attention : il y a des statues de paroissiens sur les bancs, mascarade grotesque ou réalité sous-tendue et terrifiante ? Alors que j'essaie désespérément de me calmer, un mouvement sur le crucifix attire mon regard et un détail fixe définitivement mon attention : j'aperçois un anneau gigantesque lové autour du crucifix d'or. Le souvenir d'une visite d'un bazar madrilène me revient : un homme avait dans son échoppe une peau de serpent venue des Indes : elle faisait 12 coudées de long, et à en juger par la largeur, l'animal auquel elle avait appartenu devait être plus gros que mes cuisses. Mais là, le corps apparaissait plus gros que mon tronc, et j'espérais de tout mon cœur apercevoir la partie la plus épaisse de la bête. Un rire strident et familier me sort de la transe : les serpents s'enfuient, comme pris de panique, et la forme hideuse m’apparaît enfin dans son intégralité : Méduse ! La légendaire gorgone dont la beauté vexa les dieux de l'Olympe se dresse devant moi. Elle ressemble à une très belle femme au teint olivâtre jusqu'en dessous du nombril, mais passé les hanches son corps est celui d'un gigantesque serpent. Sa chevelure est aussi constituée de serpents, mais le plus hideux reste son regard, tout en cruauté, avec l'amertume qui se dégage de ce visage qu'on devine autrefois magnifique. Tout d'un coup ses yeux se plissent, elle se cambre, et je m'apprête à sauter de coté en continuant à la fixer quand la légende et le grotesque spectacle des paroissiens de pierre me reviennent à l'esprit. Je ferme mes yeux juste à temps, je sens encore une fois le froid m'envahir, puis lorsque la sensation se dissipe je rouvre les yeux pour l'affronter. Elle prend plusieurs inspirations, puis se jette à une vitesse surprenante vers moi. Je plonge de coté, et avant que j'ai pu armer mon coup de fouet j'entends un fracas sur ma droite. Je saute en arrière pour éviter la volée de bancs et de statues brisée qu'elle a projeté avec sa queue. Elle recommence à plisser les yeux, et je décide alors de profiter de cet instant de vulnérabilité. Redoutant une feinte, je préfère toutefois attendre un peu. De nouveau la vague de froid, et cette fois ci, j'attaque de toute mes forces lorsqu'elle reprend son souffle. Le son du fouet sur la chair est effroyable, et l'espace d'un instant je retiens mon coup, avec la sensation d'avoir frappé une femme sans défense, comme un ivrogne. A ce moment la créature agite de nouveau le gigantesque appendice qui constitue son abdomen, pour bizarrement démolir le reste des bancs et statues. Je ne réalise que trop tard l'importance de ce geste : elle vient de s'aménager un grand espace vide pour pouvoir profiter pleinement de sa vitesse, et utilise alors sa queue pour m'attaquer directement. Cette parodie grotesque de fouet prêterait à sourire si je n'avait pas la sensation que mon avant-bras gauche est en miette. Le charme vénéneux de cette créature obscurcissait mon jugement, mais la douleur qui vrille mon poignet gauche a définitivement dissipé le charme, peut-être un peu tard hélas. Les coups de fouets ont à peine entamé sa peau, qui semble plus avoir la consistance d'un cuir que celle d'une peau de jeune fille. Elle commence à bouger autour de moi pour m'encercler de ses anneaux, je décide donc de balancer une lampée d'eau bénite par terre pour limiter ses mouvement et la ralentir. La réaction est surprenante : une grosse flamme bleue, quasi-glaciale, se développe dès lors que l'eau sacrée touche le sol impie. La créature a un mouvement léger de recul, je balance toute une fiole dans sa direction, et les flammes commencent à lui lécher le bas du ventre. Alors qu'elle protège son visage et que je sens de nouveau la confiance et l'espoir m'envahir je décoche une dague en direction de sa poitrine : un hurlement ponctue mon geste, et immédiatement la plaie semble prendre une teinte grisâtre. Je décoche alors un coup de fouet en direction du visage qui se tord de douleur. La créature s'immobilise, et son visage affiche une expression étrange, de rage, de dépit ou de honte d'avoir faillit. Puis ses traits s'apaisent, et la teinte grisâtre se précise : elle se change en statue de pierre, avant de s'effondrer en un tas de sable, qui lui même s'évapore en une brume légère. A ce moment les vitraux éclatent, et octobre pénètre dans la chapelle en ruine, me laissant à la merci d'une pneumonie. Je me dirige alors vers la sacristie qui semble être la seule issue, j'y trouve une bible dont les pages sont collées par du sang séché, et un crucifix d'argent, dont les bords semblent presque affûtés, c'est d'ailleurs un des rares objets où la poussière semble ne pas s'être accumulée.
En envoyant l'eau bénite, j'en ai fait couler sur une de mes plaies aux jambes, et il semble que l'effet soit positif, je réitère donc l'expérience, avec succès : une brûlure glaciale se fait sentir au niveau des plaies, et elles prennent tout de suite l'aspect rose et propre des blessures en voie de guérison. Les marbrures sombres et vénéneuses qui entouraient les griffures et morsures ont disparues dans une ébullition mousseuse. Mon poignet me fait toujours un peu mal, mais il n'est pas cassé, Dieu merci. Je vais à présent traverser la cour intérieure pour atteindre la tour de guet, afin de rejoindre le chemin de ronde qui me mènera au mécanisme de l'horloge, seul accès au comte maudit. Avant ça, je fais un peu de feu dans la petite cheminée de la sacristie, histoire de sécher la sueur qui détrempe mes vêtements : inutile de tomber malade ici. Après m'être séché avec les vieilles hardes que j'ai trouvées ici, j'entreprends de me sustenter avec le pain et un peu de rôti froid que m'ont confiés les villageois.

Je profite de mon arrivée sur le chemin de ronde pour noter ces quelques lignes. Mes blessures ne me lancent plus, j'entreprends donc de traverser ce qui semble avoir été un charmant jardin d'agrément, avant d'être à présent un champs de débris envahis de broussailles rebelles. A mesure que j'avance, mon attention est captée par de légers mouvements sous les broussailles : une hideuse créature bondit sur le chemin et s'avance alors en sautillant. Elle ressemble à un lièvre de belle taille, avec une tête humaine vaguement barbue et des oreilles effilées. Elle me saute dessus et entreprend de me mordre pour sucer mon sang : cette chose a plus en commun avec une puce qu'avec un lièvre. Un coup de poing pour la décrocher, un coup de fouet pour l'occire, et voilà, fini. Après examen, la chose ressemble à un nain bossu, aux mains difforme, au faciès indescriptible de rongeur galeux. Les bruits qui courent sous les broussailles me tirent de ma « contemplation » : la chose n'est pas seule, et si je laisse une meute de ces créatures me sauter dessus je ne m'en sortirai pas. J'entreprends donc d'avancer à pas feutrés, en tuant les choses dès qu'elles sautent sur le chemin. La progression continue sans encombre jusqu'à ce que j'arrive au pied du petit escalier qui mène au chemin de ronde. Là je suis de nouveau accueillis par les squelettes, le pire étant l'état de délabrement des marches. A présent, je suis au début du chemin de ronde, j'aperçois dans la cour l'ombre de la tour qui constitue mon objectif.

Je suis en vie ! J'ai peine à le croire, mais tous mes os me font trop mal, je suis donc encore vivant.
La traversée du chemin de ronde aurait presque été sans encombre, s'il ne manquait pas la moitié du chemin. Et j'ai eu la surprise de constater qu'en ces lieux maudits même les corbeaux sont noctambules ! Le maître des lieux a décidément toujours l'idée la plus perverse pour rendre ma progression pénible. Arrivé à la moitié du parcours je peux admirer l'immense tour d'horloge au pied de laquelle je me rend. Un coup d'œil à ma montre confirme une de mes théories : l'heure semble déterminée par la grande horloge, qui dicte la volonté de son maître à tout le château. Accolé à la tour j'aperçois le « nid » du démon : une absurdité architecturale reposant sur un escalier suspendu qui semble défier toutes les lois divines de la gravité. Je continue donc mon chemin, jusqu'à arriver au pied de la tour. J'ouvre alors la porte, et une certaine déception m'envahit : en fait d'accès à la machinerie de l'horloge me voici dans ce qui semble être un grenier abandonné, couvert de poussière et de toiles d'araignées. Je descend les 2 marches grinçantes avant de poser les pieds sur un plancher apparemment très vermoulu. C'est l'odeur poussiéreuse de camphre et de miel qui affole mes sens. Ce que j'avais pris pour un amas de haillons posés sur de vieux sacs de blé commence à se déplier : une forme grotesque, vaguement humaine, se dresse devant moi, entièrement enveloppée de linges poussiéreux. La chose pousse un grognement étouffé, exhalant une poussière brune, en tendant ses bras dans ma direction. Le fouet claque vigoureusement, et au bout de la quatrième fois j'arrive à atteindre le visage de la chose, qui explose en répandant cette poudre brune suffocante, avant de s'effondrer sur elle-même comme une pile de carte. Alors que je continue de tousser, je me sens pris par la gorge : une autre de ces choses était tapie sous l'escalier de bois à l'entrée, et elle a utilisé ses bandages comme un lasso pour m'étrangler et me faire venir vers elle. Je me retourne et me saisis de la bande pour diminuer la pression sur mon cou. Le plancher grince de plus en plus alors que je saisis le crucifix d'argent pour l'envoyer dans la tête de la créature. Je rate ma cible, et alors que je souhaite avoir de nouveau l'objet en main pour réessayer, la croix métallique ralentis sa course et se dirige vers moi, en écorchant le cou de la créature au passage. La prise se relâche, et j'en profite pour fouetter le faciès de la chose. Le « visage » de tissus éclate dans une explosion de poussière brune, et je comprend alors avec horreur le machiavélisme du piège : la magie qui animait ces 2 créatures était liée à celle qui assurait la solidité du plancher, de sorte que même si les gardiens étaient vaincus, je ne m'en sorte pas. Le plancher s'effondre donc sous mes pieds et je sombre dans l’abîme. Je me suis réveillé il y a peu, dans l'obscurité humide d'un souterrain, étendu sur une pile d'ossements friables qui ont, semble-t'il, amorti ma chute. J'entreprends immédiatement de laver les coupures à l'eau bénite, particulièrement l'esquille qui s'est fichée dans ma cuisse : me voici couvert de flammes bleues gelées, et ruisselant d'une écume surnaturelle. Mes plaies étant propres, je me repose un peu, et je bande mes blessures : il va me falloir trouver des herbes médicinales et des bandes propres.

Enfin la lueur de la lune ! J'ai cru un instant ne jamais sortir de ce cloaque répugnant. La cavité où j'ai « atterri » était tapissée d'ossements, friables et fongueux. J'ai pensé qu'il s'agissait de la tanière d'une bête gigantesque, mais au vu des traces de dents et de griffes sur certains cranes, j'ai opté pour le lieu de rassemblement de créatures plus modestes. D'ailleurs, quelques pas plus loin, le sol s'avère être un ponton humide et glissant, et une série de clapotis m'aide à identifier immédiatement le danger : je suis en plein milieu de la tanière des hommes poissons. J'avance donc prudemment, mes yeux s'étant accoutumés à la pénombre ambiante, en éliminant les malheureuses créatures dès qu'elles sautent hors de l'eau (on repère aisément le moment grâce au chapelet de bulles qui éclatent en surface). J'arrive ensuite à ce qui semble être la fin du ponton, la lueur de l'extérieur visible au loin, j'ai alors 2 choix : essayer de sauter sur le radeau branlant qui flotte à 2 pas, ou tenter d'accéder à la galerie qui s'ouvre dans la paroi (nager dans ces eaux grouillant de monstres anthropophages n'est PAS une option, allez savoir ce qui dort au fond de ces ténèbres). En effet, une paroi se dresse devant moi, de sorte que le radeau que j'aperçois se trouve sous une voûte à hauteur d'homme, voire moins. La galerie en revanche, semble assez haute, hélas, l'entrée se situe trop haut pour mes jambes, et un essai raté signifie un plongeon dans les eau sinistres, j'opte donc pour le radeau, après avoir envisagé l'idée grotesque d'utiliser un homme poisson bondissant hors de l'eau comme marche-pied vers ce tunnel. J'atterris de justesse sur le radeau, humide, instable et glissant. J'ai lié grossièrement un fémur et une omoplate trouvés en chemin pour confectionner une rame de fortune. Nul courant dans ces eaux froides, une impulsion et me voici en route vers la lueur tant désirée de la lune. Les eau bouillonnent autour de moi, les homme poissons veulent de la chair fraîche, ils ne l'auront pas. Heureusement, ils sont trop bêtes pour penser à faire chavirer le radeau en s'agrippant tous à lui, et préfèrent attaquer en sautant vers moi. Je joue frénétiquement du fouet, et j'accoste enfin. Devant moi l'escalier qui monte vers l'extérieur, je grimpe les marches à toute allure, et me voici dans ce qui semble être une guérite d'accès au mécanismes des fontaines. Je me repose un peu, et je couche ces quelques lignes.

Quelle puanteur mes aïeux ! Me voici dans un autre cloaque, après avoir échappé aux assauts du jardin. En effet, une fois sorti des fontaines, me voici dans ce qui semble être une autre cour intérieure, autrefois richement décorée. Évidemment, les hommes-puces sont au rendez-vous, d'une manière qui confirme ma première impression : celle de rongeurs grotesques ! En effet, ils sont à présent utilisés comme projectiles vivants par des aigles (oui, des aigles en pleine nuit !), et arrivent donc en quantité conséquente, à un rythme qui menace de surclasser ma capacité à les détruire. Je cherche donc le premier accès au donjon qui se dresse devant moi. Une rigole à ciel ouvert sortant du mur attire mon attention : la lourde grille en fer qui obstrue l'orifice est largement descellée, et 2 coups de hache dans le torchis friable me permettent de la faire tomber. Que les homme-puces me suivent si ça leur chante, les aigles eux ne suivront pas dans ce tunnel. L'odeur est insoutenable, on se croirait dans une tannerie, mais je me doute bien que le château n'a jamais abrité ce genre d'activité, et la perspective qu'il s'agisse du résultat des salles de tortures m'égratigne le mental. Alors que je m'avance au sein du boyau, une vision de cauchemar m'accueille : le squelette d'un énorme serpent sort du mur, et s'anime à mon approche, en exhalant des flammes. La marge de manœuvre est plus qu'étroite, je décide donc d'utiliser le crucifix d'argent : celui- ci ébrèche le crane à l'aller, puis sectionne les vertèbres au retour. Le crane retombe lourdement au sol, et un coup de fouet le fait éclater dans une grosse étincelle bleue. Le boyau est à présent plus étroit, jusqu'à ce que j'arrive sous une lourde grille en fer. Je couche ces quelques lignes alors que je reprend des forces au milieu de l'odeur nauséabonde d'abattoir afin d'arriver à soulever la grille.

Mais à quel jeu sinistre le maître des lieux s'est-il amusé ?! Une fois sorti du conduit, me voici dans une étrange pièce, au sol pavé d'un carrelage blanc et incurvé vers la grille par laquelle je suis entré. Une table massive trône devant moi, équipée d'entraves pour, du moins le crus-je, torturer quelqu'un. Le bois est maculé de sang, et un squelette inerte, arborant une tenue de carabin, est assis contre le mur, la nuque apparemment brisée. Des étagères, remplies de bocaux au contenu étrange (il me semble reconnaître des organes) tapissent 2 des murs. Une lumière puissante émane d'une étrange machine accrochée au plafond. C'est la vibration du sol que je ressens dans mes pieds qui me fait faire volte-face : un géant se dresse devant moi ! Celui-ci ressemble à une énorme cicatrice, grotesque poupée de chair animée par la volonté d'un dément. Le crissement des griffes sur le carrelage parvient trop tard à mes oreilles : un homme puce vient de me mordre le mollet, avant de se percher sur l'épaule du géant. Est-il sorti de la grille ? Je songe presque à reboucher l'orifice, mais un coup d'œil circulaire me montre l'entrée de la pièce, encombrée de gravats, avec une ouverture suffisante pour laisser passer d'autre de ces choses. Les murs recèlent aussi d'autres accès, il me faut donc abattre cette chose au plus vite. Un premier coup de fouet au visage du géant : pas d'étincelle bleue ! Cette chose n'est pas animée par de la magie ! Aucune chance de l'entamer suffisamment avec le fouet, il va falloir utiliser autre chose, de plus.. tranchant. Le temps de réfléchir, le gnome bondissant s'est de nouveau accroché à mon mollet. Mon attention étant fixée sur lui, je ne vois pas arriver le coup de poing : mon bras gauche encaisse le choc tandis que je suis projeté dans les étagères. Les bocaux répugnants éclatent, et tandis que les éclats de verre m'entaillent la nuque, l'odeur d'alcool inonde la pièce. Le bon coté, c'est qu'en théorie l'eau de feu devrait purifier les coupure, le mauvais, c'est que si je m'approche d'une flamme, je finirai rôti. Alors que je reprend mes esprits, je donne un coup de pied au gnome qui revient à la charge, avant de l'achever d'un coup de fouet : aussitôt, un autre passe sa tête hideuse par le soupirail en face de moi. Le géant est à présent situé entre moi et la grille qui m'a permis d'arriver, je décide donc d'envoyer ma hache dans sa poitrine de toute mes forces. Il titube légèrement, son pied gauche tombe dans le trou, et le voilà déséquilibré. J'envoie alors une dague dans sa gorge, ce qui semble le ralentir. Sans marquer de temps d'arrêt, j'envoie un bocal dans sa figure, avant d'expédier le gnome dans sa direction d'un vigoureux coup de pied. Ça y est, je m'empare alors d'une fiole d'eau bénite et j'en asperge le nain grincheux. Les flammes bleues réagissent comme je l'espérais : l'alcool s'enflamme, et la tête du géant se met à brûler. La créature émet un râle déchirant en portant ses mains au visage, je me précipite sur lui, j'arrache ma hache de sa poitrine, et je lui sectionne le cou, de plusieurs coups. Le corps titanesque s'effondre dans un soubresaut, et j'aperçois le visage hideux d'un gnome pris de panique : je vais avoir la paix. Un examen rapide de la dépouille me permet de comprendre le gigantisme : les différentes carnations ne laissent aucun doute : ce corps a été assemblé de toutes pièces, à partir de plusieurs cadavres ! Reste l'énigme de son animation : il ne s'agit pas d'un golem de chair, car il n'est pas animé de façon mystique. Il semble que ce soit un pur exploit médical, je ne sais si je dois être admiratif ou horrifié par le principe. Deux portes se présentent à moi : la première est un placard, remplis de matériel médical, notamment d'herbes sacrées ! Je vais enfin pouvoir soigner toutes mes blessures en profondeur.

Je me sens fatigué, pas seulement physiquement, mais aussi mentalement. La seconde porte que j'ai empruntée pour arriver jusqu'ici débouchait sur une autre pièce, horrible. J'ai déjà vu des salles de torture, l'Inquisition disposant d'un matériel que je qualifierais presque de fabuleux s'il n'était destiné à si cruelle entreprise, mais cette pièce était différente. La concavité du sol qui menait à la grille où je suis arrivé se prolongeait sous la porte jusqu'à cette salle épouvantable : apparemment il était coutume de faire couler de grandes quantités de sang. Cette pièce n'était pas une salle de torture, mais il ne s'agissait pas non plus d'un abattoir. Les traces de sang, les entraves particulières, tout pousse mon instinct à croire que les malheureux étaient découpés vivants pour fournir la chair la plus fraîche possible à l'abomination que je venais de détruire. Je vomis à la seule évocation de cette horreur, je décide donc de traverser le plus vite possible, sans prêter attention au décor, je ne ressent aucune menace physique dans cette pièce suffocante. La sortie déboule sur les geôles, et là, je sens mes forces mentales et physiques s'effriter. Mes forces physiques sont mises à l'épreuve par la faune grotesque qui peuple ces lieux : on a l'impression que le dément qui a bâti la chose du rez-de-chaussée s'est amusé avec les ossements pour créer d'autres créatures, comme l'énorme araignée constituée d'ossements qui m'a barré la route au 2eme étage. Heureusement, toutes ces choses sont animées par magie, quelques coup de fouet et hop, fini. Mes forces mentales, en revanche, sont sapées petit à petit par cet endroit. Outre la vision de ces pantins grotesques qui elle seule pourrait fissurer la santé mentale d'un individu normalement constitué, c'est la tristesse et le désespoir qui transpirent de ces murs qui m'affaiblissent. J'ai beau être seul depuis que j'ai pénétré le château, c'est depuis que je suis entré dans cet antichambre de l'enfer que je me SENS seul. Au 3eme étage, je remarque une bifurcation, menant à une porte, j'y vais, et après quelques coups de hache pour faire sauter la serrure, me voici dans un couloir. Je souffle un peu et j'essaie de me calmer pour écrire ces lignes.

Ça y est, je sais d'où venaient mes angoisses : en entendant grincer derrière moi, je me suis retourné brusquement, juste à temps pour apercevoir un spectre avant qu'il ne me touche. J'ai immédiatement senti une grande lassitude m'envahir, j'ai presque eu les larmes aux yeux en réalisant que j'allais lâcher mon fouet. Mais, le simple fait de savoir que cette angoisse et ce désespoir sont induits par un élément extérieur et hostile suffit à les dissiper de moitié. Heureusement d'ailleurs, car ces couloirs sont gardés par des armures enchantées assez résistantes. Je continue ma progression, et je profite d'une fenêtre pour chercher dans quelle direction se trouve la tour d'horloge. Il me faut apparemment monter d'un étage, et traverser la grande galerie de tableaux, en direction de la bibliothèque.

Si je ne suis pas devenu fou après avoir vu ce que j'ai vu, plus rien ne peut entamer mon mental. Après être passé devant de grands tableau en trompe l'œil (j'ai presque senti le soleil sur ma peau en passant devant l'un d'eux), j'ai atteint la bibliothèque, dont une des portes donne sur la terrasse qui mène au second chemin de ronde. Une fois franchies, les portes se sont refermées derrière moi, et ma tension fait un bond vers le plafond. Je sens tous mes poils se hérisser avant d'être pris de suées. La présence qui hante ces lieux est terrifiante, mon souffle est court, mon équipement semble réagir à ce phénomène : le crucifix dégage une légère phosphorescence, l'eau bénite semble se réchauffer, même les dagues vibrent. Un tas de livre est jeté au milieu de la bibliothèque, comme si on avait préparé un autodafé. Les ouvrages restés sur les rayons semblent hostiles, et mon attention saute d'une étagère à l'autre, à la recherche du monstre qui m'a piégé. Soudain, l'air se rafraîchi, et une distorsion, semblable à celle provoquée par une flamme, laisse apparaître mon adversaire : Cronus !
Cette figure de mort encapuchonnée armé d'une faux, réminiscence de l'image d'un dieu païen qui servait à illustrer l'hécatombe de la peste de 13XX se dresse devant moi. La chose ricane, avant de se jeter sur moi. Je saute au dernier moment à cause de la stupeur, ce qui est un bien finalement, car elle n'a pas eu le temps de repositionner son énorme faux pour m'atteindre. Le temps de me remettre sur mes 2 pieds je sens un courant d'air sur ma nuque : pas le temps de me retourner, la douleur me vrille l'omoplate ! Une faucille est fichée dans mon dos, la protection en cuir a heureusement freiné sa course. Je saigne toutefois, et la panique me gagne au moment où je sens plusieurs flux d'air frais dans ma direction. Je repère plusieurs distorsions de l'espace, et je comprend alors d'où viennent les projectiles. Je réalise alors que j'ai perdu mon adversaire de vue ! Il s'est positionné derrière la pile de livres, et je comprend alors sa stratégie : détourner mon attention pour m'attaquer dans un angle mort. Alors que j'esquive les projectiles, je trébuche sur un livre et je sens ma panique grimper en flèche en voyant arriver la gigantesque faux dans ma direction. Je roule de coté et me relève promptement. Il est assez curieux de voir qu'en pareil circonstances j'ai pris le temps de remarquer les visages grimaçants qui ornent les couvertures de ces ouvrages impies et hostiles. La chose hurle du haut du tas de livres, et je sens l'hiver s'engouffrer de toutes parts dans la pièce, prêt à me mettre en pièce à coup de faucilles. Je décide d'envoyer une fiole d'eau bénite sur la pile en poussant un cri de rage. Les flammes se propagent à toute la pile, et mon adversaire se fige, comme gelé par l'immense flamme bleue qui illumine la pièce. Je sens mon courage revenir et je commence à jouer du fouet. Chaque impact déclenche d'immenses étincelles bleues, accompagnées d'un fracas digne du tonnerre. Chaque coup semble améliorer mon moral et ma confiance, comme s'ils dissipaient le maléfice qui me ronge depuis que j'ai entrepris l'ascension du donjon. Finalement la chose explose en un cri de dépit strident au milieu d'une gerbe d’étincelles bleues aveuglantes. L'air se réchauffe, du moins c'est la sensation que j’éprouve, la vapeur qui s’échappe de ma bouche tendant à prouver qu'il fait pourtant très froid ici. Je décide de profiter de l'accalmie pour me soigner, et pour enlever le sang séché de mon armure. Il ne me reste qu'une fiole d'eau bénite, je vais devoir être prudent et éviter de la gaspiller.

Je profite d'une accalmie pour coucher ces quelques notes. Arrivé à l'entrée du chemin de ronde menant à l'horloge, je constate que celui-ci est très délabré. Mais mon attention est vite détournée par une série de cris strident désagréablement familiers : une demi douzaine de chauve-souris géantes se dirigent vers moi. Tenter d'affronter ces choses en équilibre sur ce pont branlant serait suicidaire. Je décide donc, avec un calme qui me surprend presque, de me servir de ma montre. L'air se fige, les monstres ralentissent, puis s'arrêtent tandis que je saute d'une portion à l'autre du pont. Le temps reprend son cours alors que je m'engouffre dans une monstrueuse porte de pierre en forme de gueule de dragon qui tente de refermer ses mâchoires sur moi, coupant la route aux monstruosités volantes qui me soufflaient sur la nuque. Me voici dans l'horloge, qui dévoile son mécanisme cyclopéen. Il va me falloir trouver un accès au pont supérieur.

Enfin ! Après avoir risqué la mort une quinzaine de fois, soit en risquant de finir broyé dans un engrenage, soit en manquant de tomber en ratant un saut à cause d'une chauve souris de belle taille. Les parties de balançoire et de trapèze en utilisant les pendules font également partie des réjouissances létales... Mon objectif est là, en haut d'un escalier de pierre. Je ne saurais dire si je me sens calme ou tendu. L'orient lointain semble soudain pâlir, il est l'heure d'agir ! J’entends alors le mécanisme titanesque de la tour ralentir, comme si la magie du lieu cherchait à suspendre le temps pour éloigner l'aube. Je vais devoir agir pour contrer cela. Cependant, une idée me traverse l'esprit, alors que je repense à ma mésaventure lorsque je suis arrivé au pied de la tour d'horloge : et si le bâtiment perdait toute cohésion physique à la défaite du maître des lieux ? Le nid d'aigle où m'attend mon adversaire semble petit, je n'aurai sans doute aucun mal à fuir en courant. Mais la tour d'horloge et ses mécanismes vicieux demanderaient trop de temps pour être négociés : je finirai immanquablement ensevelis sous les gravats si je n'organise pas une fuite plus rapide. Par chance, j'ai pensé à emporter une corde. Après avoir accroché une extrémité à l'un des gonds de la porte de la tour, je la laisse pendre dans le vide : elle s’arrête à environs 3 mètres au dessus du chemin de ronde, je n'aurai pas de mal à me laisser tomber sur la terrasse. Après avoir enroulé la corde au pied de la porte, me voici prêt à affronter mon destin ! Il me reste 2 dagues, une fiole d'eau bénite, ma hache (très ébréchée) et le crucifix d'argent, la montre semblant inopérante.

Je suis vivant ! Le soleil caresse mon visage, et j’apprécie cette sensation comme si j'avais passé 100 ans dans les ténèbres ! Arrivé dans l'antre de la chose, nulle présence à première vue. Puis une sensation de froid intense et d’écœurement, l'impression d’être épié par quelque fauve monstrueux tapis dans l'ombre. Je me retourne brusquement pour voir un visage grimaçant flotter à quelques pas de moi. Le regard de cette chose est si cruel et fascinant que je ne remarque pas tout de suite qu'il s'agit d'une tête sans corps. Puis la chose souris (NDT : toute consonance humoristique de cette phrase est fortuite ! Le texte original étant rédigé en allemand !) , et un choc se fait sentir à travers la pièce, alors que le reste de son corps se matérialise brusquement. On dirait un homme d'un age incertain, à la fois jeune par ses traits, et terriblement vieux par l'expression de son visage. Il est immense, au moins 7 pieds de haut ! Le reste de sa silhouette est dissimulée par une lourde cape de velours noir dont le col laisse supposer un intérieur rouge sang. Soudain il ricane, et dans un... clapotis ? Je ne saurais l'exprimer autrement, c'est comme si le tissu de la réalité était un plan d'eau et qu'il était tombé dedans. Il disparaît de ma vue, mais je sens le froid dans mon dos : je bondis droit devant moi en me retournant, et je décoche une dague à hauteur de poitrine, alors qu'une hideuse main griffue écarte un pan de la cape. Deux choses marquent mon esprit à ce moment : l’intérieur de cette cape est un espace de ténèbres iridescentes quasi hypnotiques d'où s’échappe une gerbe de flammes, et ma dague semble traverser son corps comme si elle percutait un plan d'eau. Je saute de coté pour éviter les flammes, et je remarque alors que je n'entends rien : aucun son de dague percutant un mur ou se fichant dans une poutre. Elle semble avoir été engloutie par les ténèbres de la cape ! Entre temps mon adversaire s’évanouit dans les airs, et mon cœur s’affole : s'il se matérialise trop près, je finirai dissout dans les ténèbres ! Le froid dans mon dos : cette fois je me retourne immédiatement, avant de sauter en arrière, en décochant ma dernière dague en direction de sa tête. Cette foi-ci le projectile se fiche en plein front, la créature grimace et pousse un mélange de grognement et de sifflement qui fait trembler toute la pièce. Cela n’empêche pas la créature d'ouvrir sa cape pour vomir une nouvelle gerbe de flammes. Trop concentré sur les effets de ma dernière dague, je saute trop tard et sens la morsure des flammes sur ma jambe droite. Curieusement, passé la sensation de douleur, je constate très vite que mon fouet semble légèrement briller, alors que mes bottes et mon pagne en feu m'obligent à rouler au sol tout en surveillant la prochaine réapparition de mon adversaire. Je décide alors une manœuvre risquée : je donne un coup de fouet en direction des flammes lorsque la cape s'ouvre à nouveau. Le résultat est étonnant : les flammes semblent s’évanouir à proximité du fouet. Cela explique que ma brûlure soit superficielle au niveau de la hanche. De plus, le fouet n'a pas été happé par les ténèbres de la cape. Mon adversaire disparaît de nouveau en ricanant, je me concentre et je bondis pour pouvoir atteindre son visage, tout en profitant de l’élan pour faire tournoyer mon fouet afin d'éteindre les flammes avant qu'elles ne m'atteignent. Une gerbe d’étincelles bleues signale le succès de la manœuvre, suivie immédiatement d'un feulement rauque. A partir de là mon adversaire recommence à disparaître pour réapparaître ailleurs, de plus en plus vite. Chaque coup de fouet qui fait mouche semble à la fois le faire souffrir un peu plus, mais également le motiver. Puis finalement il commence à ralentir, et je me rend compte que son « visage » n'est plus qu'une cicatrice grotesque et boursouflée, il s'immobilise et je donne un dernier coup de fouet pour l'achever. C'est alors qu'un phénomène étrange (et après coup je suis même surpris, après tout ce que j'ai vu ce soir, de considérer cela plus étrange que le reste) se produit : il s'immobilise, son visage semble enfler exagérément, et le reste de sa silhouette semble soudain devenir plus consistante, comme si elle pénétrait enfin vraiment notre réalité. La tête finit par exploser, et alors qu'un geyser de sang huileux inonde jusqu'au lointain plafond de la pièce, le reste du corps se met à enfler, tandis qu'une voix gutturale et caverneuse semble psalmodier une malédiction tout autour de moi. La réalité semble se voiler au fur et à mesure que la dépouille de mon adversaire se disloque en laissant apparaître une créature grotesque, haute de plus de 10 pieds ! Le démon qui se dresse devant moi est une telle vision d'horreur que je ne saurais le décrire précisément : si la structure est vaguement anthropomorphe, il a également une courte queue écailleuse, des griffes longues comme des couteaux, et une gueule abominable garnie de dents acérées ! Sa peau semble constituée d'un cuir épais, parfois couverte de poils, parfois recouverte d’écailles. Lorsqu'il se met à hurler en levant les bras, je remarque une membrane partant du petit doigt (si on peut encore appeler ça un doigt!) jusqu'à la taille. Mon adversaire ressemble à présent à ce qui semble être un mélange grotesque entre une immense chauve souris et un homme. Mais le mot « Dracula » signifie dragon, et je commence à porter toute mon attention vers sa gueule, à raison ! En effet, il se met à cracher une immense gerbe de flammes dans ma direction, et par un réflexe miraculeux je me jette à ses pieds, avant de rouler entre ses jambes. Une gigantesque main griffue tente de me couper en 2, juste au moment où je roule le plus loin possible. Voyant que je me rapproche de l'entrée de la pièce, il bondit, puis commence à battre péniblement ce qui lui sert d'ailes, avant de retomber lourdement sur le sol à 1 pas de moi. Apparemment cette forme n'est pas censée exister dans notre réalité, c'est pourquoi elle semble si pataude et incapable de voler véritablement. Par contre, sa force, sa masse et ses flammes sont autant de menaces réelles et suffisantes pour que je le prenne très au sérieux. J'envoie ma hache dans son visage : c'est à peine si elle arrive à entamer le cuir épais de son mufle, mais le léger mouvement de recul, et le temps qu'il prend pour la mordre et la broyer avant qu'elle ne retombe me permettent de lui donner un coup de fouet à l'abdomen : la bête hurle dans une gerbe bleue ! Furieux, il ressaute pour m’écraser, cette fois-ci je plonge dans sa direction pour passer dans son dos. J'esquive d'instinct un nouveau coup de griffe, puis je le vois inspirer. Je plonge de nouveau entre ses jambes alors qu'il vomit ses flammes de façon circulaire dans la pièce. Les boiseries prennent feu, la structure se fragilise, et je commence à me diriger vers la sortie. Le monstre semble deviner mon intention, et il saute à nouveau, presque à toucher le plafond, pour atterrir entre moi et la sortie. A l’atterrissage toute la pièce tremble, et je remarque alors un rictus sur ce visage hideux : il a l'intention de sortir et de faire s’écrouler la pièce en me laissant cerné par les flammes. Je tente le tout pour le tout : ma dernière fiole d'eau bénite bouillonne à ma ceinture depuis que cette abomination a pénétré notre monde, je la fracasse à ses pieds et une immense flamme bleue commence à le lécher de bas en haut. Sous le coup de la douleur il s'immobilise et je me mets à le fouetter comme un dément. Alors que les flammes expirent, il met un genou à terre. Je cingle l'autre d'un coup de fouet et le voilà à genoux, les deux mains au sol. Je décoche alors le crucifix d'argent dans son œil gauche. La chose porte ses mains difformes à ce qui lui sert de visage, dans un hurlement rageur. Je décoche alors 3 coups de fouet : le premier le fait basculer en arrière, le deuxième ouvre une plaie béante dans son torse dont la peau tendue éclate comme un fruit trop mur le dernier touche ce qui semble être le cœur. Un éclair bleu ponctue ma dernière attaque, la chose hurle, puis semble proférer une menace gargouillante et inintelligible : si ce sont des mots, ils n'appartiennent à aucune langue connue. Le corps se raidi, puis semble se réduire en poussière. Le feu dans mon dos fait rage, je dois fuir sans faire plus de vérifications.

25 octobre 1691

Deux jours que je fais des cauchemars, j'ai une légère fièvre, et le père Andras insiste pour que je me souvienne des dernières paroles de Dracula. S'il savait à quel point je souhaite oublier tout cela pour retourner auprès des miens...

31 octobre 1691

De retour à l’Évêché de Prague : les moines ont fait des transcription écrites des dernières paroles du démon. Ils prennent soin de jamais consigner toute la phrase sur le même parchemin, et de ne jamais prononcer plus de deux mots par période de 3 minutes. Ils cherchent dans leur chroniques des paroles ou malédictions similaires. Ma santé se dégrade moins vite, les cauchemars sont moins fréquents, mais je ressens une angoisse irraisonnée.

24 decembre 1691

Joyeux Noël en vérité ! J'ai reçu une missive de l'évêché : leur recherches ont abouti. Je pars demain pour Prague.

1er janvier 1692

Catastrophe ! Les dernières paroles du comte étaient une malédiction. Je trépasserai d'ici la date anniversaire de ma victoire... Cependant, les moines se veulent rassurant : il semble que les adorateurs du comte aient conservé des reliques pour le ramener à la vie de manière anticipée. Si je trouve ces reliques, je pourrai ramener mon ennemi d'entre les morts pour lever la malédiction, et cette fois-ci, lorsque je l'occirai, ce sera définitif !

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Ps : j'avais fait le numero 60, maintenant le 120, si vous voulez lire une suite, ce sera pour le 180 !
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Cormano
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tl;dr : prenez vos couilles à deux mains et lisez ce pavé, bande de feignasses. Article de qualité :aaah:
(Sincèrement, je ne te savais pas une aussi belle plume. Chapeau !)

Par contre il est vrai que le format forum n'est pas idéal pour la lecture. Quelqu'un pour nous transformer ce beau texte en un joli PDF DTPisé comme il faut ?
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Magnifique récit super immersif ! :aaah: :aaah: :aaah:
Ah oui, ça mérite d'être davantage mis en valeur !
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anzymus
Dieu de la Borne
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